Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Le blog de la refaunation
1 octobre 2020

NEPAL et MAROC - Histoires d'oiseaux de bon augure

White-rumped_vulture_(Gyps_bengalensis)

Ce soir je vous propose non pas une mais DEUX belles histoires de refaunation, avec nos amis les oiseaux :

La première se passe au Népal. Ce pays, comme tout le sous-continent indien, a longtemps accueilli d'innombrables populations de Vautours chaugouns Gyps bengalensis et de Vautours à long bec Gyps tenuirostris qui régnaient sur les carcasses de gibiers sauvages et aussi celles des vaches sacrées omniprésentes dans les pays de culture hindouiste (l'équarrissage et la consommation des viandes par les humains étant largement tabouées). Un déclin extrêmement brutal (de l'ordre de 97 à 99% sur une période de 10 à 15 ans) eut néanmoins lieu à la toute fin du siècle dernier, le coupable étant une molécule médicamenteuse (Diclofénac) utilisée pour les soins vétérinaires mais mortelle pour les oiseaux rapaces. Cela a conduit les deux espèces à être classées "en danger critique d'extinction" depuis le début des années 2000, non sans causer par ailleurs des risques pour la santé publique (remplacement des vautours par des colonies de chiens parfois porteuses de la rage, dangereuses pour la vie sauvage, le bétail et la population humaine).

La réponse des autorités s'est toutefois faite à temps avec l'interdiction de cette molécule (et de quelques autres, également toxiques) pour les usages vétérinaires : la vente de Diclofénac vétérinaire a été interdite dès 2006 au Népal. Il n'en restait pas moins que les molécules toxiques continuaient à être administrées clandestinement, bien que de manière moins généralisée qu'auparavant. Une seconde approche a été tentée, en complément de la première, avec les Vulture Safe Zonesespaces proches des colonies nicheuses de rapaces mais dans lesquelles des actions de sensibilisation spécifiques sont menées avec le remplacement du Diclofénac (et autres molécules analogues) par du Méloxicam, une molécule sans danger pour la faune sauvage et notamment les rapaces ; de plus, des vaches en fin de vie sont rachetées aux villageois (qui ne sont plus contraints de les nourrir à leur charge ou de les abandonner), après leur mort naturelle les carcasses sont déposées en des lieux spéciaux qui permettent aux vautours de s'alimenter en toute quiétude.

Cette double approche a été un succès : les colonies de vautours des 2 espèces ont augmenté en nombre dès 2012-2013 dans le pays. Quant au Diclofénac, des enquêtes récemment menées dans les pharmacies ont confirmé que les ventes à usage vétérinaire avaient disparu.

La seconde de ces histoires se déroule aux portes de l'Europe, plus précisément au Maroc qui est à ce jour le dernier bastion des Ibis chauves Geronticus eremita à l'état purement sauvage [NDLR : une population semi-captive vit toujours en Turquie, et plusieurs projets de réintroduction sont en cours en Europe du Sud]. Son histoire a été bien différente de celle des Vautours du sous-continent indien, puisque son déclin était séculaire, avec des extinctions locales dans plusieurs pays européens (Moyen Age) puis dans la plupart des pays nord-africains et proche-orientaux (entre le 19ème et les toutes premières années du 21ème siècle).

Il restait le Maroc comme ultime bastion, avec 59 couples en 1998. Des actions de protection fortes dans le parc national de Souss-Massa et le site proche de Tamri ont conduit à une augmentation progressive, avec une population nationale s'élevant à 116 couples nicheurs (et une population totale d'environ 600 oiseaux) en 2015. Plus encore, deux nouveaux sites de nidification étaient (re?)colonisés dès 2017.

Ces évolutions positives ont conduit à reclasser l'espèce de "en danger critique" à "en danger" en 2018.

Des études récentes réalisées à partir des caractéristiques écologiques des colonies historiquement occupées par les Ibis chauves au Maroc ont aussi permis de mieux connaître les préférences de l'espèce, en vue de réintroductions ou de translocations futures au Maroc (et ailleurs ?).

Bien que les espèces concernées restent encore rares de nos jours, ces deux récits sont de bon augure (au sens premier du terme = préfiguration de l'avenir par le vol des oiseaux, d'après la langue latine) pour leur avenir, et porteurs d'espoir pour la vie sauvage du monde entier, même dans les situations les plus critiques.

Source : https://www.birdlife.org/worldwide/news/latest-research-vulture-and-ibis-recoveries-amazon-hotspot-peril

Illustration : Vautour chaugoun en vol au-dessus d'un plan d'eau. Photo Deepak Sankat / Wikimedia Commons.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Le blog de la refaunation
Archives
Publicité